Les quatre saisons du Japon

Le Haïku, poême court,

l'hiver,

le printemps,

l'été,

l'automne.

Le climat du Japon

L’archipel japonais s’étendant en longueur, il en résulte de grands contrastes climatiques.
Cependant presque tout le territoire se situe dans la zone tempérée. L'alternance saisonnière des vents est frappante entre l'hiver, où les hautes pressions de Sibérie exposent le Japon à un flux persistant de nord-ouest, et l'été, où les masses d'air tropical et humide recouvrent la plus grande partie de l'archipel.
Situé entre l'Asie, le continent le plus massif et le Pacifique, l'océan le plus vaste du globe, le Japon subit donc à la fois une forte influence continentale, et une forte influence maritime. Les quatre saisons sont ainsi très nettement distinctes.

En hiver, l'opposition est très marquée entre le Japon de l'Envers et le Japon de l'Endroit. Le premier, qui donne sur la mer du Japon, reçoit alors le vent froid de Sibérie, qui s'est chargé d'humidité à son passage sur la mer et provoque de grosses chutes de neige; au contraire, le second, qui donne sur le Pacifique et se trouve à l'abri du vent, connaît un temps clair et sec.
Au printemps et en automne, des bouffées d'air tiède et sec viennent du continent chinois: il fait alors le plus beau temps de l'année; c'est la saison des fleurs de cerisiers, ou bien celle du flamboiement des feuilles d'érables.
Mais la fin du printemps et le début de l'automne sont aussi les moments où les typhons sont les plus fréquents et frappent surtout les côtes du Sud-Est. Bien que destructeurs, ils donnent l'eau nécessaire aux rizières.
L'été, chaud et relativement sec, commence et finit avec les fortes pluies; celles-ci sont surtout abondantes dans le Sud-Ouest.


Les saisons dans la vie des Japonais

Les Japonais aiment rattacher leur vie au cours des saisons. Ceci a son origine dans la religion qui est tout à fait différente des religions monothéistes. Au Japon, la religion signifie plus esthétique et harmonie que préceptes.
Il est très important, esthétiquement, de "faire" des choses habituelles, dans le domaine religieux ou non, et au moment précis durant une année ou durant une vie.
Quand un Japonais se conforme aux usages saisonniers, il sent qu'il fait partie de l'Univers et que la Nature le supporte, ce qui le rassure profondément, alors que les commandements et le contrat avec le Dieu n'ont pas tellement d'importance.


Le Spectacle le plus photographié
au Japon: Hanami, l'admiration
des cerisiers (sakura) en fleurs

Quand les animateurs japonais commencent leurs émissions de télévision, ils disent souvent: "Il fait grand froid ce matin. La pluie d'hier a laissé des flaques et elles sont gelées..." ou bien " Ce matin les cerisiers ont commencé à fleurir en grand nombre dans la Préfecture de Kyoto"

Dans toute correspondance privée ou officielle, figurent généralement une allusion au déroulement des saisons. "Les érables commencent à rougir dans le parc voisin et j'espère que vous vous portez bien..." ou bien "Nous sommes en automne, saison de fraîcheur et aurions plaisir à vous rencontrer prochainement...".

Les deux époques les plus prisées des Japonais sont d'une part Hanami au printemps, la contemplation des cerisiers en fleurs et le Momijigari, la chasse aux érables rougeoyants

Il faut cependant noter que les saisons sont décalées par rapport à nos définitions: pour les japonais, le printemps commence vers la mi-février, l'été vers le 6 mai, l'automne vers fin août et l'hiver vers le 8 novembre.


Le Haïku

Le haïku remonte au "tanka", poème court dont le premier recueil date de 760. Le tanka, lié au culte shinto est un poème de 5 vers (5,7,5,7,7 syllabes)
La première partie (5,7,5), le "hokku" évoque la nature et la saison et la seconde (7,7) décrit les émotions et les sentiments.
Peu à peu le hokku devient poème à part entière, le "haïku", évoquant toujours la nature et la saison, mais sans expliciter les sentiments, créant ainsi un art de l'ellipse et du non-dit typiquement japonais.

Sa forme très courte est l'équivalent d'une photographie, saisissant un instant particulier à partir d'un point de vue singulier. A l'inverse des autres formes littéraires, l'écoulement du temps, le développement du sujet n'ont pas de sens.
De plus, compte tenu du peu de mots, le lecteur doit forcément puiser dans son vécu, ses souvenirs, ses propres sentiments pour goûter le haïku.

Les principaux maîtres du haïku furent:
- Matsuo Bashô, 1644-1694 ; l'initiateur
- Yosa Buson, 1716-1783, l'héritier
- Kobayashi Issa, 1763-1827, redynamise le genre qui s'affadit
- Masaoka Shiki, 1866-1902, épure et rajeunit le haïku
- Taneda Santôka, 1882-1939; moine zen et poéte

Deux Haïkus modernes:

 

 

(Kotori no su yureru kagami no yôna ichi)

Un nid de petit oiseau
Se balance
Comme des miroirs oscillants au marché

Niji Fuyuno

 

(Ame-moyo bodaiju no hana ugoki-dasu)

La pluie menace
Les fleurs du tilleul
Se mettent à remuer.

Ryu Yotsuya

Littérature japonaise moderne et contemporaine

Ce poème, le plus court du monde, obéit à des règles strictes:
Il est composé de trois vers, en tout 17 syllabes(5-7-5) et surtout doit comporter un "mot de saison", et un seul.
Ceci afin de centrer la composition sur un mot ou une expression qui évoque la fuite du temps, la conscience de l'homme dans la nature et le rythme des saisons.

Les "mots de saison"(kigo) sont répertoriés dans des dictionnaires spéciaux appelés "Saïjiki".
Ces "mots de saison" sont des allusions directes ou indirectes à la saison et à ses effets.

On peut trouver:
- Des moments de la saison: début de l'été, fin de l'hiver, etc....
- Des phénomènes météorologiques: l'orage, le ciel brûlant, le brouillard, la neige, etc...
- Des paysages caractéristiques: les avalanches ( printemps), les cascades (été), les marécages (automne), les temples sous la neige (hiver)
- Des plantes: les cerisiers en fleurs ( printemps ), le vert profond des feuilles (été), les champignons, les feuilles d'érables rouges (automne),
- La vie des animaux: les jeunes chatons, les grenouilles (printemps), les anguilles (été), les cerfs, les étourneaux, les bars (automne)
- Des éléments de la vie humaine: les labours (printemps), la bière, les examens (été), la récolte du riz(automne), l'année nouvelle (hiver)

Certains auteurs modernes prônent l'abandon de toutes ces régles formelles, comme le kigo et le nombre de syllabes. Ne resterait qu'une forme courte et en harmonie avec l'âme de son auteur.

De même les tableaux, estampes ou photographies sont très souvent marqués par une saison bien caractérisée.
Ainsi, le film de Takeshi Kitano "Dolls" , sorti en 2003, fournit une parfaite illustration esthétique avec, en toile de fond, les fleurs de cerisiers, la mer, les feuilles d'érable et enfin la neige.
Voici quelques modestes illustrations:


L'hiver

Les photos de monuments célèbres sous la neige sont recherchées

Le Jojuri-ji Kyoto

Le Pavillon d'Or (Kinkaku-ji) Kyoto

Haïkus d'hiver:

Neige qui tombais sur nous deux / es-tu la même / cette année?
Matsuo Bashô, 1644-1694

Ce trou parfait / que je fais en pissant / dans la neige à ma porte
Kobayashi Issa, 1763-1827
( Dès le 17ème siècle, le haïku peut être comique ou populaire)

Me retournant pour voir / l'homme que j'ai croisé.../ le brouillard
Masaoka Shiki, 1866-1902


Le printemps

Pour les japonais le printemps commence vers le 15 février.


Bien avant les cerisiers, ce sont les pruniers qui fleurissent en premier et donnent le signal du renouveau de la terre.

Dans les médias, le bulletin météo comporte non seulement les conditions climatiques, mais précise aussi, jour après jour l'apparition des fleurs de cerisier, dont le front, le "sakura senzen" remonte du Sud au Nord du pays.
Partout les japonais fêtent "Hanami" en passant la journée sous les cerisiers en fleurs, mangeant, buvant du saké et chantant entre amis.


Le célèbre jardin Zen du Ryoan-ji de Kyoto, avec son cerisier en fleurs

Hanami, dans le Jardin du Parc Impérial de Tokyo (Kitanomaru)

Haïkus de printemps:

Sous un voile de lune / ombre de fleur / ombre de femme!
Sôseki Natsume, 1867-1916

Le printemps qui s'éloigne / hésite / parmi les derniers cerisiers
Yosa Buson, 1716-1783


Pruniers en fleurs
Van Gogh d'après Hiroshige
1988

Van Gogh, le Japon et les arbres en fleurs

A partir de 1886, Van Gogh montre un très grand intérêt pour les estampes japonaises. Avec son frère Théo, il réunit une collection de plus de 500 œuvres, en particulier de Kunisada, Kuniyoshi et Hiroshige.
Il apprécie particulièrement les sources d'inspirations prises dans la nature, les cadrages audacieux et les couleurs éclatantes.

Il réalise des copies de maîtres japonais, puis, dans les vergers autour d'Arles, au mois d'avril 1988, il peint avec passion les arbres fruitiers en fleurs, dans un style inspiré par les estampes de ces maîtres japonais.



Poirier en fleurs
Van Gogh, 1988

L'été

L'été est la saison des arbres au vert profond, des cascades et des fêtes populaires joyeuses, ou plus graves ( Fête des morts )


Cascade à Kowakudani

Les grandes fêtes de l'été,
Gion-Matsuri à Kyoto le 17 juillet
A Kyoto, le 16 août la fin de la période "Bon" d'hommage aux morts, proche de la fin de l'été, est marquée par une fête d'origine bouddhiste où plusieurs collines qui dominent la ville sont embrasées.
Le plus remarquable est cet immense kanji "dai" (grand) de feu.

Haïkus d'été

Sous la pluie d'été / raccourcissent / les pattes du héron
Matsuo Bashô 1644-1694

Anniversaire de la Bombe / j'essuie mon corps nu / d'un matin sans blessure
Tôsei Ishida, né en 1920
Dans ce haïku contemporain, allusion au 6 août 1945, bombardement d'Hiroshima

L'automne

De même qu'au printemps la progression de la floraison des cerisiers est suivie, à l'automne, le rougeoiement des feuilles , en particuliers les feuilles d'érable ( les "momiji" ) descend du Nord vers le Sud et retient toute l'attention des japonais.


Momiji dans le Parc Aoyama, Tokyo

Toujours le pavillon d'Or, cette fois avec les "momiji"

Haïkus d'automne:

Telle la main droite / d'une sage-femme / la feuille d'érable en automne
Samboku, 17ème siècle

Les herbes se couvrent/ d'automne / Je m'assieds
Matsuo Bashô 1644-1694

Verse l'averse d'automne / je ne suis / pas encore mort!
Taneda Santôka , 1882-1939


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