Alfred Hitchcock

Cinéaste anglais; (biographie) (filmographie)
Quelques films d'avant 1960 ; d'autres films et d'autres

Londres 1899- Los Angeles 1980

 

Biographie

Alfred Joseph Hitchcock est né le 13 août 1899 à Leytonstone dans la banlieue de Londres.
Son père (William) et sa mère (Emma) étaient épiciers en gros. Ils avaient loué une modeste épicerie dans la rue principale de Leytonstone. Alfred était le cadet des trois enfants, Alfred gardera toute sa vie des rapports extrêmement distants avec son frère et sa sœur. Le petit Alfred fut un enfant extrêmement solitaire et très peureux.

Les débuts

Après un stage d'assistant technicien, il obtient son premier emploi à Londres, en 1920 : la conception des sous-titrages dans les films muets. C'est en 1923 qu'il devient assistant puis metteur en scène. Son talent lui permet une ascension rapide dans le milieu cinématographique alors florissant.
Son premier film important, Les cheveux d'or (The Lodger), sort en 1926. Dans ce film, une blonde séduisante est assassinée, et de lourds soupçons pèsent sur le nouveau locataire d'un appartement voisin, bien qu'en fait il soit innocent du crime.

Les films d'Hitchcock montrent souvent des personnes innocentes entraînées dans des situations qu'elles ne contrôlent plus, et ne comprennent parfois même plus; un thème fréquent de ses films est que ces personnages ne sont en fait coupables que de petites erreurs sans importance.
Ses films mettent beaucoup l'accent à la fois sur la peur et sur l'imagination, et sont connus pour leur humour cocasse. Downhill (1927) montrait un autre personnage accusé à tort : c'était cette fois un jeune homme accusé de vol dans son école, et chassé par ses parents, suite à ce vol. Plus tard, le jeune homme tombe amoureux d'une femme plus âgée que lui, et lorsqu'elle se réveille au matin, il aperçoit son visage ridé, tandis que des hommes rentrent un cercueil par leur fenêtre.

Hitchcock fera souvent apparaître dans ses films le lien entre Éros et Thanatos.
Meurtre (Murder, 1930) est un film un peu particulier car il matérialise la frontière entre le cinéma muet et le cinéma parlant.
Le parlant n'était pas encore reconnu universellement comme une solution d'avenir.
La production du film, qui ne souhaitait pas prendre de risques, imposa donc que le film soit muet. Hitchcock étant à l'inverse convaincu de l'intérêt du film parlant, tourna discrètement certaines scènes avec du son. Le film est donc d'abord sorti en version muette, puis est ressorti ensuite dans sa version partiellement sonore.

Hollywood

David O. Selznick pousse Hitchcock à venir faire des films à Hollywood.
Avec Rebecca en 1940, Hitchcock réalise son premier film américain - il restera d'ailleurs aux États-Unis pour presque toute sa carrière.
Rebecca évoque les craintes d'une jeune mariée naïve qui emménage dans une maison bourgeoise de la campagne anglaise, et doit s'attaquer aux legs de la défunte première femme de son mari.
L'humour des premiers films d'Hitchcock y est toujours présent, mais il mettra dorénavant plus l'accent sur le suspense puisque c'était ce que demandait le public américain.

Le jeune Hitchcock était un garçon solitaire, obèse, plein d'imagination; issu d'une famille catholique, il avait l'habitude de se confesser chaque soir à sa mère.
Ses films montrent souvent des personnages masculins en conflit avec leur mère ou en état d'infériorité vis à vis des femmes, souvent blondes et séduisantes.
Dans La mort aux trousses (North by Northwest), Roger O. Thornhill (Cary Grant) est un homme innocent, ridiculisé par sa mère parce qu'il est persuadé que de mystérieux meurtriers le poursuivent.
Dans Les oiseaux (The Birds), le personnage de Rod Taylor se retrouve dans un lieu envahi par des oiseaux vicieux, tandis qu'il essaie d'échapper à l'emprise de sa mère.
Le personnage du tueur, dans Frenzy, vit également dans la même maison que sa mère.
Les problèmes de Norman Bates, dans Psychose (Psycho), sont également célèbres..

Dans Pas de printemps pour Marnie (Marnie), la belle Tippie Hedren est kleptomane.
Dans La main au collet (To Catch a Thief), Grace Kelly est voleuse de chats. Après s'être intéressée à la vie de Thorwald, dans Fenêtre sur cour, Lisa pénètre par effraction dans l'appartement de Thorwald.
La blonde séduisante de France c'est la jeune Claude Jade dans L'étau (Topaz) en fille d'un agent secret. Et dans Psychose (Psycho), Janet Leigh vole 40 000 $ avant de se faire assassiner par un certain Norman Bates (Anthony Perkins) qui se prenait pour sa propre mère.

Les films les plus personnels d'Hitchcock sont probablement Les enchaînés (Notorious) et Sueurs froides (Vertigo) – tous deux sur le thème de l'obsession et de la névrose d'hommes manipulant des femmes.
Sueurs froides (Vertigo) explore en détail les relations entre le sexe et la mort. Dans ce film, bien que James Stewart sache que Kim Novak n'est qu'un accessoire du crime, ils ne peuvent s'empêcher de tomber amoureux l'un de l'autre. Le personnage de Stewart ressent un besoin violent de contrôler sa compagne, de l'habiller, d'adorer ses vêtements, ses chaussures, ses cheveux.

Le style

Bien qu'il travaillât souvent avec des scénaristes extrêmement doués, tels que Raymond Chandler, Hitchcock avait beaucoup de mal à rendre à l'écran les scénarios de ses films.
Il eut d'ailleurs un jour ce commentaire : « Le scénariste et moi-même rédigeons le script jusque dans ses moindres détails ainsi, lorsque nous avons terminé, il ne reste plus qu'à tourner le film. Mais en fait, dès que nous entrons en studio, nous devons commencer à faire des concessions. En réalité, le scénariste a la plus belle part du travail car il ne doit pas s'inquiéter des acteurs et de tout le reste. »

Hitchcock était souvent critique envers les acteurs et les actrices, dénigrant par exemple le jeu de Kim Novak dans Sueurs froides (Vertigo), ou déclarant que les acteurs doivent être considérés comme du bétail.
Hitchcock considérait que le fait de tout faire reposer sur le jeu des acteurs et des actrices n'était qu'une coutume héritée du théâtre.
Il fut par contre pionnier dans sa manière d'utiliser les mouvements de la caméra, les prises de vue et les montages, mais également dans sa façon d'explorer les confins de l'art cinématographique.

Les "apparitions" d'Hitchcock

Dans la plupart de ses films, Hitchcock s'arrangeait pour apparaître à l'écran un court instant. A ses débuts, il s'agissait surtout d'économiser un figurant. On le voyait parfois monter dans un bus, passer devant un magasin, dans une publicité de magazine pour un régime amaigrissant !
Trouver Hitchcock dans chacun de ses films est d'ailleurs devenu un jeu très populaire parmi ses spectateurs. On trouve même des livres et des sites internet spécialisés sur le sujet. Le plus souvent Hitchcock apparait dans les cinq premières minutes du film, pour que la recherche de sa présence ne vienne pas trop détourner le spectateur de l'intrigue.

Le Mac Guffin

Le Mac Guffin est un concept original dans le cinéma d'Hitchcock.
L'origine du mot viendrait de l'histoire suivante, racontée par Hitchcock : Deux voyageurs se trouvent dans un train en Angleterre. L'un dit à l'autre : "Excusez-moi Monsieur, mais qu'est-ce que ce paquet à l'aspect bizarre qui se trouve au-dessus de votre tête ? - Oh, c'est un Mac Guffin. A quoi cela sert-il ? - Cela sert à piéger les lions dans les montagnes d'Ecosse - Mais il n'y a pas de lion dans les montagnes d'Ecosse - Alors il n'y a pas de MacGuffin" .

Hitchcock utilisait souvent cette anecdote pour se moquer de ceux qui exigent une explication rationnelle et une cohérence parfaite pour tous les éléments d'un film. Ce qui l'intéresse c'est de manipuler le spectateur, de le promener au fil de l'histoire et qu'il ait aussi peur que le héros ou l'héroïne de son film. Peu importe les petites tricheries ou les approximations sur la vraisemblance.
Hitchcock considérait les films pour ce qu'ils sont, c'est à dire un spectacle et non une copie conforme de la réalité.

Dans les films d'Hitchcock, le MacGuffin est souvent un élément de l'histoire qui sert à l'initialiser voire à la justifier mais qui s'avère en fait sans grande importance au cours du déroulement du film.
Dans Psychose, le MacGuffin est l'argent dérobé par Marion à son patron au début du film, il va sans dire que la suite est tellement prenante que l'argent est bien vite oublié, mais c'est lui qui a initialisé l'histoire.

Hitchcock et François Truffaut

François Truffaut était un grand admirateur d'Hitchcock ( Voir la page Truffaut-Hitchcock) Son premier entretien avec Hitchcock date de 1955. Au début des années 60, il multiplie les entretiens pour aboutir en 1966 à la  publication du livre « Le cinéma selon Hitchcock  », avec le concours d’Helen Scott.
 Dans cet ouvrage le réalisateur-écrivain-admirateur-questionneur essaye de répondre à des questions fondamentales concernant le cinéma :
- Comment s’exprimer de façon purement visuelle ? (en effet, certains films d’Hitchcock, comme Psychose, sont en grande partie muets )
- Comment susciter des émotions ?

A la différence d’une énigme (qui a tué ? ), dont la résolution n’apporte qu’une  brève émotion, le fait de mettre le public dans la confidence comme quand l’assassin est connu depuis le début, et qu’un innocent est accusé permet d’impliquer le spectateur tout au long du film (comment l’innocent va se disculper ?)
Hitchcock accentue la propension du spectateur à s’identifier au héros de ses films en utilisant des procédés techniques adaptés : gros plans, caméra subjective, intérêt porté à des détails ou des objets précis, montage serré. Il exerce un art consommé de la suggestion. Ainsi tous les spectateurs de Psychose sont marqués par la scène horrible où Norman assassine Marion sous la douche ; et pourtant on ne voit aucun coup porté ni aucun contact entre le couteau et le corps.

Hitchcock transforme également le spectateur respectable en voyeur, brouillant encore plus la distinction entre coupable et innocent, et ne la faisant apparaître clairement qu'à la fin.
Dans Fenêtre sur cour (Rear Window), après que L. B. Jeffries (James Stewart) aie passé une bonne partie du film à observer Lars Thorwald (Raymond Burr), celui-ci lui fait face et lui demande « Que me voulez-vous ? ». Burr pourrait tout aussi bien poser sa question au spectateur.
Fenêtre sur cour était également un défi technique qu'Hitchcock s'était imposé : un film tourné entièrement depuis la même place ; un seul point de vue qui parvient néanmoins à maintenir notre attention.

La critique et les récompenses

Hitchcock ne fut jamais très apprécié de la critique de son époque. Seul Rebecca reçut l'Oscar Academy Award du meilleur film. En tant que producteur, Hitchcock fut nommé pour son film Soupçons (Suspicion). Il fut également nommé meilleur metteur en scène pour cinq de ses films : Rebecca, Lifeboat, La maison du docteur Edwardes (Spellbound), Fenêtre sur cour (Rear Window) et Psychose. Mais le seul Academy Award qu'il reçut fut le prix Irving G. Thalberg Memorial, en 1968.

Alfred Hitchcock meurt le 29 avril 1980 à Los Angeles (USA)


Filmographie :


Quelques films

 

* L'Inconnu du Nord-Express ( Strangers on a Train) de Alfred Hitchcock, sorti en 1951 ; scénario de Raymond Chandler, Czenzi Ormonde et Whitfield Cook d'après le roman de Patricia Highsmith, durée 101 mn.
Avec Farley Granger (Guy Haines), Ruth Roman (Anne Morton), Robert Walker (Bruno Antony) , Leo G. Carroll(le sénateur Morton), Patricia Hitchcock (Barbara Morton) , Jonathan Hale (Mr. Antony ), Laura Elliott (Miriam Joyce Haines) , Howard Saint-John (le capitaine Turley ), Norma Varden (Mrs. Cunningham), John Brown, Robert Gis.

Guy Haines, un champion de tennis, rencontre dans le wagon-restaurant d'un train un inconnu, Bruno Anthony, qui lui propose un marché bien spécial : Bruno assassinera la femme de Guy, Miriam, qui refuse de divorcer, l'empêchant d'épouser Ann dont il est épris, tandis que Guy tuera le père de Bruno, que ce dernier déteste. Ainsi, les mobiles étant échangés, les pistes seront brouillées et rien ne désignera les auteurs des crimes.
Guy refuse ce marché et descend du train en oubliant sur la table du restaurant un briquet que lui a offert Ann. Quelque temps plus tard, Miriam est étranglée ; et il commence à comprendre que le contrat vient d'être engagé. A partir de là, Bruno n'aura de cesse de pousser Guy à exécuter la seconde partie du marché.

En plus du suspense et de la montée de l'angoisse habituelle dans ses films, Hitchcock explore le coté trouble du couple ( potentiellement homosexuel, voir la scène finale sur le manège) Bruno et Guy, l'ombre et la lumière. Bruno représente la face cachée de Guy, une face perverse dont Guy n'a pas pris conscience et qu'il n'a jamais affrontée. Il est important par exemple qu'au moment où Guy joue frénétiquement au tennis en plein soleil, on assiste en parallèle aux efforts de Bruno pour récupérer le briquet tombé dans une bouche d'égout. Hitchcock insiste pour que nous nous identifions aussi bien au " méchant " qu'au héros. D'où notre désir de voir Bruno retrouver le briquet qui va servir à perdre Guy.
Pour Hitchcock dès qu'un innocent se compromet avec un criminel sous quelque forme que ce soit, il devient coupable. Le Mal entre en lui. Encore une fois, Hitchcock croit à l'inné, mais aussi à l'acquis. En fait il ne croit pas à l'innocence. Le triomphe du bien, à la fin du film, n'est là que pour répondre aux règles de bienséance du "Happy end".

Hitchcock avait commandé le scénario au célèbre auteur de roman policier Raymond Chandler, mais toutes les scènes étaient remises en question par les conceptions très personnelles de Hitchcock et Chandler répondait : " Eh bien ! si vous trouvez des solutions tout seul, pourquoi avez-vous besoin de moi ? " Chandler quitta la production et Hitchcock fit appel à Czenzi Ormonde pour finir le travail.
<= L'apparition rituelle d'Alfred Hitchcock dans ce film: Alors que Guy Haines descend du Nord-Express où il a fait la connaissance de Bruno, il monte dans le train avec un étui de contrebasse.

* Fenêtre sur cour (Rear Window ) de Alfred Hitchcock, sorti en 1954; scénario de John Michael Hayes, adapté de la nouvelle homonyme de Cornell Woolrich (un des pseudonymes de William Irish) ; durée 110mn.
Avec James Stewart (L.B. Jeffries), Grace Kelly (Lisa Carol Fremont), Wendell Corey (le lieutenant Thomas J. Doyle), Thelma Ritter (Stella), Raymond Burr (Lars Thorwald), Judith Evelyn (Miss Lonelyheart)


Grace Kelly

L.B. Jeffries, journaliste, est cloué dans son fauteuil avec une jambe dans le plâtre. Entre les visites de sa logeuse qui lui prépare ses repas et celles de sa collègue et fiancée Lisa Carol Fremont, il tue le temps en observant l'immeuble situé en vis à vis, de l'autre côté d'une cour intérieure. Il s'amuse un moment des tranches de vie, parfois drôles, quelquefois plus tristes, surprises chez ses voisins, quand le silence d'un appartement habitué aux disputes le frappe, d'autant plus que le comportement du mari, représentant de commerce, et l'absence prolongée de la femme ne cessent de l'intriguer.
Après avoir utilisé Lisa, il interviendra lui-même pour découvrir la vérité.

Fenêtre sur cour était un défi technique qu'Hitchcock s'était imposé : A part une séquence d'ouverture, c'est un film tourné entièrement depuis la même place dans un vaste décor reconstitué en studio; un seul point de vue qui parvient néanmoins à maintenir notre attention. Car Hitchcock joue sur le voyeurisme du spectateur et sur sa maîtrise de la progression dramatique.

Suivant son habitude, Alfred Hitchcock est visible dans son film, on le voit dans un des appartements faisant face à celui de Jeffries, pendant qu'une personne joue du piano, il répare une pendule.


* Sueurs froides (Vertigo) de Alfred Hitchcock, sorti en 1958; scénario de Samuel A. Taylor & Alec Coppel, adapté du roman "D'entre les morts" de Pierre Boileau et Thomas Narcejac; durée 128mn, musique de Bernard Herrmann
Avec James Stewart ( Detective John 'Scottie' Ferguson), Kim Novak (Madeleine Elster & Judy Barton), Barbara Bel Geddes( Midge Wood), Tom Helmore (Gavin Elster), Henry Jones (Le Coroner), Raymond Bailey, Ellen Corby, Konstantin Shayne

John Ferguson dit "Scotty", un ancien policier souffrant de vertige (d'où le titre anglais) revoit un des ses anciens ami Gavin Elster qui lui propose d'enquêter sur sa femme, Madeleine qui semble perdre la raison.
Celle-ci est en effet fascinée par sa grand-mère, Carlotta Valdez une femme célèbre à San-Francisco disparue tragiquement. Scottie rencontre Madeleine et tombe immédiatement amoureux d'elle.
Lorsque celle ci fait une tentative de suicide (pour imiter Carlotta morte par suicide), il la ramène chez lui. Madeleine emmène ensuite Scottie à la mission espagnole ou Carlotta Valdez est enterrée. Une fois sur les lieux, elle monte dans le clocher et se jette dans le vide. Incapable de la suivre à cause de son vertige, Scottie ne peut rien faire pour la sauver.

En proie à une forte déprime, Scottie erre dans San-Francisco et rencontre par hasard une jeune employée de bureau un peu vulgaire, Judy, qui semble ressembler fortement à Madeleine.
Il la séduit, l'obligeant à s'habiller et se coiffer de la même manière que Madeleine. Mais tout cela n'a rien du hasard.
Judy était en fait complice de Gavin Elster pour se débarrasser de sa femme. Sachant que Scottie n'irait pas en haut du clocher, Elster avait jeté sa femme déjà morte faisant ainsi croire à un suicide.
Judy commet l'erreur de mettre un soir un des bijoux de Madeleine (le pendentif de Carlotta) et Scottie découvre la supercherie. Pour confondre Judy, il l'emmène de nouveau à la mission espagnole, parvient à grimper en haut du clocher avec elle et lui fait avouer sa complicité.
C'est alors le destin surgit sous l'apparence d'une nonne qui apparaît dans le clocher, Judy, prise de panique, tombe dans le vide au même endroit que Madeleine.


Kim Novak en Madeleine
& en Judy

Pour illustrer les scènes de vertige, Alfred Hitchcock utilise la caméra subjective, mais d’une façon particulière : alors qu’il filme, vers le bas, la profondeur de la cage d’escalier que James Stewart est censé voir avec angoisse, la caméra opère deux mouvements simultanés : un mouvement d’appareil vers l’arrière (travelling arrière) et un mouvement optique vers l’avant (zoom avant). Le résultat de cet artifice technique appelé travelling compensé, utilisé ici pour la première fois dans un film, est une image qui se déforme, comme si la cage d’escalier s’allongeait.

Dans le roman de Pierre Boileau et Thomas Narcejac, D'entre les morts, le personnage principal est impuissant.
Dans l'adaptation cinématographique Alfred Hitchcock s'amuse à multiplier les clins d'œil ironiques sur la sexualité de Scottie, incarné par James Stewart. Ainsi dès la deuxième scène, un dialogue interminable dans l'appartement de Midge, il joue avec une canne pendant que Midge fait allusion à leurs courtes fiançailles rompues parce qu'il ne s'est rien passé. Il la pointe même vers un soutien-gorge car Midge travaille dans la fabrication de lingerie féminine, ce qui contribue à érotiser encore plus la scène. Cette canne est donc un substitut de son sexe dont il ne sait que faire en présence d'une femme qui veut l'aimer charnellement. Midge lui parle comme à un enfant "you are a big boy now !".
À la fin de la séquence, Scottie essaie de lutter contre le vertige en grimpant progressivement sur un escabeau. Hitchcock montre, dans un plan très bref, des dessins de femme au pied des marches. C'est une tentative d'érection qui est ainsi suggérée. Elle se termine par un fiasco dans les bras de Midge, éternelle insatisfaite.
L'ironie atteint son comble par l'utilisation de la tour Coit, authentique et bien connue par tous les habitants de San Francisco et dont l'érection a été financée par une dame qui s'appelait Lillie Hitchcock Coit (aucun lien de famille avec Sir Alfred !). La tour, évident symbole phallique, représente une lance d'incendie car Lillie voulait rendre hommage aux pompiers de la ville. La tour apparaît constamment par la fenêtre de l'appartement de Scottie comme pour se moquer de son manque de vigueur sexuelle. Quand Madeleine, après sa tentative de suicide, vient le remercier de l'avoir sauvée, elle lui dit qu'elle a retrouvé son appartement grâce à elle. Scottie répond que c'est la première fois qu'elle lui est utile à quelque chose.

Alfred Hitchcock, après le succès du film les Dioboliques de H.G. Clouzot, demanda à Boileau-Narcejac de lui écrire un scénario dans la même veine que celui des Diaboliques : ce fut Sueurs froides. Ce film est l'un des plus beaux, mais aussi des plus sombres d'Hitchcock. Les personnages sont solitaires et rongés par la passion, la haine ou la culpabilité. Les cauchemars de Scottie sont particulièrement angoissants.
Vertigo , trop dur pour le public de l'époque a connu un demi-échec cmmercial avant de devenir un film culte.


* La mort aux trousses ( North by Notrh-West ) de Alfred Hitchcock, sorti en 1959, scénario de Ernest Lehman, musique de Bernard Herrmann, durée 135mn,
avec Cary Grant (Roger O. Thornhill/George Kaplan), Eva Marie Saint (Eve Kendall), James Mason (Phillip Vandamm), Jessie Royce Landis (Clara Thornhill), Leo G. Carroll (le professeur), Josephine Hutchinson (Mrs Townsend), Philip Ober (Lester Townsend ), Martin Landau (Leonard)

Un publicitaire de New-York, Roger Thornill, quitte son agence et retrouve des amis dans un bar. Désirant joindre sa mère, il fait signe à un groom au moment même où un certain Georges Kaplan est appelé dans la salle. Cette coïncidence le fait passer pour cet homme. Deux individus l'enlèvent et le conduisent chez un nommé Lester Townsend. Thornill a beau nier être ce Kaplan, rien n'y fait.
Il échappe à un accident de voiture, mais personne ne veut croire à son aventure. Il se rend alors aux Nations-Unies, là où le véritable Townsend travaille. Au moment où il allait s'expliquer avec lui, celui-ci est poignardé. Il est photographié à cet instant devenant ainsi le meurtrier. Il va devoir fuir toujours plus vite à la fois la police et les mystérieux espions.
Progressivement, le héros malgré lui va se prendre au jeu et s'identifier à un véritable agent secret. Alors que dans d'autres films, Hitchcock nous montre comment un homme ordinaire peut devenir coupable, dans ce film il devient héros.

Un autre thème du film est l'opposition entre le monde urbain où Thornill vit et un monde plus sauvage, celui de la campagne, des montagnes où il perd tout repère. C'est dans le premier monde que se déroule la célèbre scène de l'avion.
Cette séquence où le héros est pourchassé par un avion dans les champs de maïs est devenue un véritable morceau d'anthologie. La force de la scène tient en grande partie à l'inversion des codes cinématographiques habituels.
On ne trouve pas les éléments classiques comme l'obscurité, la pluie, la sensation d'enfermement qui définissent un lieu un meurtre va se produire.
Au contraire, c'est sur une route déserte, entre deux champs, sous un soleil de plomb que Thornill attend le véritable Georges Kaplan. Le suspense est créé par la seule attente et, à l'inverse des films ordinaires, par l'absence de musique.

Ce film est un moment de "pur cinéma", c'est à dire entièrement assujetti à la force de la réalisation, faisant passer le scénario au second plan. Les invraisemblances, qui sont nombreuses, ne sont pas rédhibitoires. Le spectateur est entraîné dans l'aventure du héros en s'identifiant à sa personne. La scène finale sur le mont Rushmore est tellement intense, tellement grandiose, qu'on ne se pose plus de question sur la rationalité de tel ou tel geste.
Le film devient un modèle qui inspire les films de James Bond. Il propose une trame de pur divertissement, ponctuée de rebondissements incessants et inattendus, ainsi que des lieux grandioses qui enveloppent les personnages. En brisant la règle habituelle de l'unité de lieu, le film sert de véritable modèle pour les films d'aventure à venir.

La plupart des décors de ces scènes sont réalisés en studio. L'équipe de tournage ne reçoit pas l'autorisation de filmer dans le véritable immeuble des Nations-Unies. De même, les Parcs Nationaux refuse de laisser filmer sur les visages du mémorial du Mont Rushmore. Les responsables ne veulent pas de scène de violence sur un haut lieu de la démocratie américaine.


la scène de l'avion

Le Mont Rushmore, de nuit
Après l'incompréhension suscitée par "Vertigo", ce film est un des plus grands succès d'Hitchcock. La critique salue son retour à la forme classique du thriller. A l'âge de 60 ans, il acquiert une notoriété internationale jamais atteinte par aucun autre réalisateur hollywoodien.

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