Les films de l'année 2005


Ronit Elkabetz

Films sortis en France, en 2005, par ordre alphabétique

* Le Château ambulant, (Hauru no ugoku shiro) de Hayao Miyazaki, film d'animation japonais, sorti en 2005, durée 119 mn, inspiré du roman "Le château de Hurle" de l'Anglaise Diana Wynne Jones, voix originale de Chieko Baisho, Takuya Kimura, Akihiro Miwa.
Sophie, vit dans la petite ville de Market Chipping avec sa belle mère et ses deux soeurs, Lettie et Martha.
A la mort du père, la belle-mère met en apprentissage les deux jeunes sœurs et garde Sophie pour l'aider dans son magasin de chapeaux.
Dans le même temps, un château magique s'est installé à coté de la ville. Il est réputé être habité par un sorcier mystérieux. Au cours d'une livraison en ville, Sophie échappe à des démons à l'aide d'un séduisant jeune homme.

Jalouse des talents de Sophie, une sorcière la maudit et la transforme en une vielle femme. Dans l'impossibilité de s'expliquer , Sophie s'enfuit de la ville. Vieille et fragile, elle lutte pour marcher loin de la ville et doit se résoudre de trouver abri dans le château du sorcier Howl. Elle y est admise par Calcifer, le démon de feu qui est condamné à faire vivre et bouger le château.

Le sorcier Howl est en fait le jeune homme aperçu en ville. Il utilise toute son énergie pour lutter contre les autres sorciers et tenter de mettre fin à la guerre meurtrière qui règne entre les deux royaumes voisins.
Un pacte est conclu entre Sophie et Calcifer: si elle trouve comment briser le contrôle du démon, il la libérera de la malédiction.

"Le château ambulant" est un film fantastique et baroque, situé dans une Europe imaginaire du XIXe siècle et influencé par des histoires de sorcellerie moyenâgeuse, des contes d'amour romantique et des récits japonais de guerre et d'initiation.

Miyazaki a trouvé une histoire lui permettant de laisser libre cours à toute les ressources de son imagination. La multiplicité des décors naturels et des architectures, les machines délirantes, les personnages à l'apparence changeante constituent un terrain idéal pour mettre en œuvre l'audace des choix esthétiques, la virtuosité du trait, et la poésie du dessin en 2D qui caractérisent ses films. Le scénario est très riche, conçu comme pour un film d'auteur et quelquefois touffu.
Le goût du réalisateur pour les incessantes métamorphoses rendent la narration haletante. Ainsi Sophie, transformée en vieille femme, passe suivant les circonstances et les sentiments des personnages par toute les nuances, depuis la femme adulte jusqu'à la vieillarde rabougrie. Ce film peut être vu à différents niveaux et à tout âge (sauf par les tout-petits). Il est exempt des niaiseries disneyennes et du manichéisme américain par la profondeur et l'ambiguïté des personnages, le jeu sur les codes du conte, les évocations mythologiques, la diversité des atmosphères mentales.

Voir la filmographie complète de Hayao Miyazaki


* Prendre femme , de Ronit & Shlomi Elkabetz, film israëlo-français, sorti en 2005, durée 97 mn,
avec Ronit Elkabetz (Viviane Simon Abkarian (Eliahou), Gilbert Melki (Albert), Dalia Beger (Dona), Omer Moshkovitz (Gabrielle), Valérie Zarrouk (Yvette), Carl Zrihen (Victor), Yehiel Elakabetz, Solika Sabag, Itai Tamir.
Prendre femme a remporté le Prix de la critique et le Prix du public à la Mostra de Venise 2004. La même année, l'actrice-réalisatrice Ronit Elkabetz a reçu le Prix d'interprétation féminine au Festival de Jérusalem.

L'histoire se déroule en Israël , à Haïfa, en juin 1979 durant les 3 jours qui précèdent l'entrée du Shabbat, dans une famille de juifs d'Afrique du Nord. À l'époque, après la venue du Président égyptien Anouar El Sadate à la Knesset apparaissait pour la première fois, une espérance de tous les possibles. Dehors c’est la paix, à l’intérieur de la maison chacun mène sa guerre.
Une fois encore, Viviane est sur le point de quitter Eliahou, son époux. Une fois encore, ses frères réussissent à la persuader que sa place est auprès de son mari, ses enfants et sa famille. Fatiguée de cette existence qui dénie ses rêves et ses droits, lasse de cet époux qui privilégie les traditions juives au détriment de la modernité et de leur vie de couple, Viviane reste, mais elle est à bout.

Au même moment, Albert, un homme qu'elle a aimé, mais qui n'a pas voulu s'engager, resurgit dans sa vie. Un homme ayant su, l'espace d'un trop bref moment, lui offrir ce que tous les autres hommes de sa vie lui avaient toujours refusé : la liberté d'être elle-même.

Les deux réalisateurs, frère et sœur, se sont inspiré de leur enfance et de leurs parents. C'est à la fois un film très intimiste et un témoignage sur l'évolution de la culture juive et son choc avec les exigences de la vie moderne.
C' est le portrait d’une femme qui cherche à briser les barrières sociales et se battre pour l’amour, la féminité, le couple et les émotions étouffées par la routine du quotidien et des obligations.


Ronit Elkabetz et Gilbert Melki

C’est aussi l’histoire d’un homme qui essaie de mener sa vie, de la diriger dans la direction voulue et qui trébuche sans fin sur des obstacles internes. Il veut maintenir les anciennes traditions et il est incapable de se défaire des conventions strictes dans le respect desquelles il a été élevé et qui l’emprisonnent désormais.
Beaucoup de ces affrontements tournent autour de la cuisine et de la nourriture, point important du Shabbat.

La V.O. est déterminante pour ce film qui alterne, quelquefois dans la même phrase, l'hébreu et le français, en fonction de la situation, de l'interlocuteur, de l'humeur et du sujet. Quelques mots d'arabe de Tunisie complète le tableau.


* Le Promeneur du Champ de Mars, de Robert Guédiguian, sorti en 2005, librement inspiré du témoignage de Georges-Marc Benamou, "Le dernier Mitterand"; avec Michel Bouquet (François Mitterrand), Jalil Lespert (Antoine Moreau), Philippe Fretun (Docteur Jeantot), Anne Cantineau (Jeanne), Sarah Grappin (Judith), Catherine Salviat (Mado), Jean-Claude Frissung ( René).

C'est l'histoire d'une fin de règne et d'une fin de vie : celle de François Mitterrand, dont le nom n'est pourtant jamais cité.
Alors que le Président livre les derniers combats face à la maladie, un jeune journaliste passionné tente de lui arracher des leçons universelles sur la politique et l'histoire, sur l'amour et la littérature, mais aussi tente de lui arracher sinon des aveux du moins des justifications sur son passé de Vichy.
Ce journaliste vit dans l'attente de ses rendez-vous rares mais intimes avec le Président au point de laisser tomber sa compagne, enceinte.

Le film ne montre ni l'épouse, ni les maîtresses ni les fils, évoque à peine la fille cachée et l'exercice du pouvoir.
Il est pourtant dense et se concentre sur quelques amis, le médecin, le garde du corps et surtout sur les rapports du Président avec la maladie, la mort prochaine, le passé, la trace qu'il laissera dans l'histoire. On le voit même étudier et critiquer les dernières paroles des Grands de ce monde sur leur lit de mort.

Mais il s'agit surtout de rendre compte d'un isolement choisi par l'homme. Il refuse l'hospitalisation et réduit le personnel à son service. Il se dit finalement satisfait d'occuper la seule place encore vacante du caveau de famille. Il envisage le vertige d'être un de ces gisants dont il aime palper la pierre à la basilique Saint-Denis.
Il est en constant commerce avec le passé. Le sien propre et celui du pays qu'il dirige. Pays où vibre encore l'esprit d'écrivains démodés (Péguy, Léon Blois, et Chardonne avec Les Destinées sentimentales).

Robert Guédiguian déclare: "François Mitterrand a incarné la possibilité du socialisme en France et en Europe au moment même où les pays socialistes s’effondraient dans le monde entier. Il a, qu’on le veuille ou non, qu’elles qu’aient été, dans son destin, les parts de conviction et d’ambitions personnelles, rendu le rêve socialiste crédible pendant une longue décennie. Cette décennie, je l’ai vécue avec obstination. Poser à nouveau, aujourd’hui, la question d’une alternative au capitalisme mondialisé à travers un personnage historique me semble être en droite ligne (devrais-je dire en gauche ligne) avec tout ce que j’ai tenté de faire jusqu’à présent : c’est-à-dire participer à travers le cinéma aux interrogations de notre époque."


* De battre mon coeur s'est arrêté, de Jacques Audiard, sorti le 16 mars 2005, durée 110 mn, scénario de Jacques Audiard et Tonino Benacquista, musique de Alexandre Desplat ; avec Romain Duris (Tom), Aure Atika (Aline), Emmanuelle Devos (Chris), Niels Arestrup (Robert, le père), Jonathan Zaccaï (Fabrice), Linh Dan Pham (Miao Lin ); Mélanie Laurent.

A 28 ans, Tom semble marcher sur les traces de son père dans la branche immobilière, c’est-à-dire en poussant toujours plus loin les limites de la légalité pour engendrer le profit : magouilles, délogement musclé de locataires indésirables et négociations financières impitoyables forment son quotidien. Ses relations sentimentales et ses copains sont aussi placées sous le signe de la magouille, du fric et des apparences.
Une rencontre fortuite le pousse à croire qu’il est encore temps pour lui de devenir autre chose, et plus précisément le pianiste concertiste qu’il rêvait d’être, à l’image de sa défunte mère. Sans cesser ses activités, il prépare une audition, avec une jeune chinoise immigrée de fraîche date. Elle ne parle pas français et la communication avec elle est très difficile.

Sous ce portrait dont les contrastes pourraient sembler forcés, des conflits intimes se nouent. Tom est encore jeune, mais il a vécu, il est déjà formé, déformé. Malfrat, il l'est par son père, qui lui a montré l'exemple et le tient comme un chien en laisse, dressé pour lui rendre service. Musicien, il l'a été des années plus tôt grâce à sa mère, qui lui a fait apprendre le piano, mais qui est morte. La mauvaise éducation, la bonne.
Mais le film ne tombe pas dans la caricature, l'opposition est rapidement plus nuancée. Du côté des hommes, la cruauté se fait facilement attirante, jouissive. Une ambiguïté qu'incarne parfaitement le père. Dans cet univers masculin, les combats sont explicitement castrateurs, et pourtant Tom peut avoir l'illusion qu'ils sont formateurs. Du côté des femmes, il pourrait apprendre autre chose, une partition plus complexe. Mais il n'est certainement pas capable de la maîtriser d'instinct. Et avec qui se lancerait-il, de toute façon, dans ce milieu où les filles sont juste des coups ?


Comme image forte, il y a Tom, habillé en Dior, mais avec une tache de sang sur sa chemise blanche. Tom lui-même est tantôt séduisant et tantôt tête à claques. Audiard aime ce personnage, téméraire, orgueilleux, qui donne des coups et reçoit des leçons de la vie. C'est vrai qu'il devient attachant, fort, passant de l'ignoble à l'espoir. Là où son héros rêve de rompre radicalement avec son destin de voyou, il montre qu'il y a, au contraire, un mélange entre vie d'avant et vie d'après.
Avec le personnage de Tom, Jacques Audiard dessine aussi le portrait, sec et précis, d’un milieu affairiste français. Un milieu raidi par la course aux profits et la morgue qui s’y rapporte.

Avec ce film, Jacques Audiard atteint sa maturité et termine peut-être de régler ses comptes avec ses parents. Son cinéma est précis, efficace et parfaitement en phase avec son propos


* Million Dollar Baby, de Clint Eastwood, sorti en 2005, durée 132 mn , scénario de Paul Haggis d'après F.X. Toole (Jerry Boyd), musique de Clint Eastwood, images Tom Stern;
avec Clint Eastwood ( Frankie Dunn), Hilary Swank ( Maggie Fitzgerald), Morgan Freeman ( Eddie Scrap ), Jay Baruchel (Danger Barch), Mike Colter ( Big Willie Little), Lucia Rijker ( Billie 'The Blue Bear'), Brian F. O'Byrne ( Father Horvak ), Anthony Mackie (Shawrelle Berry), Margo Martindale ( Earline Fitzgerald), Riki Lindhome ( Mardell Fitzgerald), Michael Pena ( Omar )

Rejeté depuis longtemps par sa fille, l'entraîneur Frankie Dunn s'est replié sur lui-même et vit dans un désert affectif, en évitant toute relation qui pourrait accroître sa douleur et sa culpabilité.
Il entretient une relation conflictuelle, mystérieuse et quasi-quotidienne avec un prêtre.
Le jour où Maggie Fitzgerald, 31 ans, l'aborde dans une salle de combat puis pousse la porte de son gymnase à la recherche d'un coach, elle n'amène pas seulement avec elle sa jeunesse et sa force, mais aussi une histoire jalonnée d'épreuves et une exigence, vitale et urgente : monter sur le ring, entraînée par Frankie, et enfin concrétiser le rêve d'une vie.
Après avoir repoussé plusieurs fois sa demande, Frankie se laisse convaincre par l'inflexible détermination de la jeune femme.
Alors s'installe entre eux une relation mouvementée, tour à tour stimulante et exaspérante, au fil de laquelle Maggie et l'entraîneur se découvrent une communauté d'esprit et une complicité inattendues.
La marche triomphale de Maggie vers le titre mondial butte sur un dernier obstacle qui détruit son espoir, sa carrière et son corps même. Trahie par sa famille, elle abandonne la vie en gardant le souvenir de son meilleur combat.

Clint Eastwood signe là un film remarquable, et surprenant à plus d'un titre.
La technique est époustouflante, les combats sont rendus avec un réalisme et une présence saisissante.
Pour parfaire sa prestation Hilary Swank a travailler plus de trois mois pour se préparer au rôle de Maggie. L'actrice travailla ainsi avec Hector Roca au Gleason's Gym de Broadway. Celui-ci a coaché de nombreux champions du monde, et la comédienne a également eu droit à de longues séances quotidiennes de musculation sous le contrôle de l'entraîneur et haltérophile Grant Roberts. Durant cette période, Hilary Swank eut notamment pour sparring-partner la quadruple championne du monde Lucia Rijker.

Sur le fond de l'histoire, Eastwood, qui passe pour un Républicain proche de Bush, adopte des positions étonnantes: le prêtre ne répond à aucune des questions de Frankie, qu'elles soient pratiques ou philosophiques.
Le mythe de la réussite possible en partant de rien en prend en coup , car les magouilles et l'argent forment des obstacles quasi-impossibles à surmonter.
La famille pauvre est lâche , calculatrice et sans pitié. La médecine ne fait pas de miracle et en fin de parcours l'euthanasie apparait comme la moins mauvaise des solutions.

Onze ans après Impitoyable, Clint Eastwood a de nouveau triomphé lors de la 77e cérémonie des Oscars, se retrouvant pour la seconde fois de sa carrière récompensé par l'Oscar du Meilleur réalisateur.
Million dollar baby
a pour sa part été sacré Meilleur film par l'Académie, tandis que Hilary Swank, déjà auréolée d'un Oscar pour sa prestation dans Boys don't cry, et Morgan Freeman ont respectivement remporté la fameuse statuette en or dans les catégories Meilleure actrice et Meilleur second rôle masculin. Le film a reçu trois autres nominations.
Et pourtant les studios Warner Bros. avec lesquels Clint Eastwood est lié depuis plus d'une trentaine d'années se sont engagés tardivement sur le projet, ne le trouvant pas assez rentable financièrement. Les principaux fonds nécessaires à la production de Million dollar baby proviennent des sociétés Lakeshore Entertainment et Malposo, à l'initiative du film.


* Lemming , de Dominik Moll; sorti le 11 mai 2005; scénario de Dominik Moll, Gilles Marchand; production Diaphana et France 3 Cinéma, directeur de la photographie Jean-Marc Fabre; ouverture du Festival de Cannes 2005;
avec Laurent Lucas (Alain Getty), Charlotte Gainsbourg ( Bénédicte Getty), Charlotte Rampling (Alice Pollock ), André Dussollier (Richard Pollock), Jacques Bonnaffé (Nicolas Chevalier ), Véronique Affholder (Francine)

Alain Getty est un jeune et brillant ingénieur en domotique, co-inventeur d'une fabuleuse « web-cam volante autonome» qui travaille au sein de l'entreprise Pollock SA. Avec sa femme Bénedicte, ils sont récemment installés dans une nouvelle ville, "Bel-Air", en grande banlieue de Toulouse et reçoivent à dîner le patron d'Alain, Richard Pollock, et son épouse Alice. Le repas est une jolie scène, entre satire sociale et absurde ordinaire. Les deux invités sont très en retard et une violente dispute entre Richard et Alice interrompt le repas.

Cette rencontre perturbe l'harmonie du jeune couple. La découverte du cadavre d'un mystérieux rongeur dans l'évacuation bouchée de leur évier semble aussi apporter une touche de mystère et de surnaturel dans leur vie bien rangée, d'autant plus qu'il s'agit d'un lemming, espèce présente seulement au nord du cercle polaire. Alice s'impose brutalement dans leur vie jusqu'à se suicider dans leur chambre d'amis, bouleversant le cours de leur vie.

Acceptant l'invitation de Richard d'aller se ressourcer dans son chalet, près d'un lac au pied du Pic d'Ossau, le jeune couple s'installe mais Bénedicte entame un jeu pervers de réincarnation d'Alice et disparait dans la nuit.
Ce jeu se terminera par un crime, semble-t-il parfait, en tous cas impuni.

Cinq après Harry, un ami qui vous veut du bien, Dominik Moll signe un film plus travaillé, mais moins plaisant et plus exigeant aussi, car il nous dérange en évoquant cruellement les questions de la culpabilité et de la fidélité.
Il nous raconte la quasi impossibilité du couple parfait, fusionnel ou éternel, en l'illustrant par le jeune couple et dénonce l'illusion des "arrangements" des vieux couples infidèles.

Le film touche à la fois à la psychologie, voire à la psychanalyse en décrivant un cas limite de transfert. Le film présente des aspects surnaturels, mais il semble que ce soit une fausse piste introduite par les scénaristes pour intriguer le spectateur, car à la fin du film, chaque élément peut être expliqué rationnellement, en y incluant les rêves et les hallucinations.
Ce qui est certain c'est que le lemming du titre joue le rôle du Mac Guffin des films d'Alfred Hitchcock. Les références à David Lynch sont aussi à noter.



Chalotte Gainsbourg et Laurent Lucas

Les scènes du chalet de montagne ont été tournées au lac de Bious Artigues.
Charlotte a été doublée, pour les scènes de nage dans les eaux froides du Lac, par Marion Paroix, une fille du Pays d'Ossau (au centre sur la photo)

La lente maturation du film dans un article remarquable de Télérama


* Peindre ou faire l'amour de Arnaud et Jean-Marie Larrieu, sorti le 24 août 2005, avec : Sabine Azéma (Madeleine), Daniel Auteuil (William), Sergi López (Adam), Amira Casar (Eva); présenté en sélection officielle à Cannes 2005

William et Madeleine forment un couple sans histoire dans la périphérie de Grenoble: bourgeois sans luxe, et presque sans enfant, leur fille unique est partie vivre en Italie. Lui est météorologiste en (pré)-retraite, angoissant un peu devant tout ce temps libre offert. Elle dirige une entreprise de peinture, mais qui lui laisse assez de temps libre pour poser son chevalet d'amateur au milieu d'un pré, face aux monts du Vercors. Quand un homme fait irruption dans son cadre, elle est disponible, la seule compagnie du paysage ne lui suffit visiblement pas. L'homme, Adam, est aveugle et maire du village voisin. Il incite Madeleine à voir une belle maison délabrée mais charmante et à vendre. William la visite à son tour et décide rapidement de l'acheter et de la rénover.

Adam et sa compagne Eva sont deviennent les amis de William et Madeleine. L'ambiguïté et la sensualité s'installent doucement et se montre au grand jour quand Eva dit son désir de poser pour Madeleine et se déshabille.

Le destin se présente sous forme d'un incendie qui détruit la maison d'Adam et conduit les deux couples à vivre sous le même toit.
L'échangisme, ou plutôt l'amour à quatre s'installe délicatement et reste pudique et timide, les moments impudiques surgissant par surprise.

Sergi López, garde un peu de l'inquiétante influence de Harry, un ami qui vous veut du bien pour suggérer une manipulation satanique, mais celle-ci ne se révèle finalement pas: chacun a en lui ses fantasmes et les réalise comme il peut. Les prénoms sont évidents: Adam et Eva ne représentent que le péché originel et finalement véniel.
La fin du film montre que chaque couple peut garder sa liberté et sa fraîcheur de vivre.

Ce film est parfois lent ou langoureux suivant les goûts. Le charme des paysages, la délicatesse du jeu des acteurs en font un spectacle agréable, même si le manque d'audace fait passer les frères Larrieu à coté du chef d'œuvre.

Citation des frères Larrieu:
"On éprouvait devant les comédiens la sensation qu'un musicien de jazz doit éprouver devant un "standard" : à la fois simple, clair, connu de tous et en même temps susceptible d'être interprété de mille et une manières jusqu'à se réinventer sous nos yeux", notent-ils. "C'est aussi ce qu'éprouvent les personnages face au temps qui passe et aux saisons qui reviennent : un mélange incroyable de souvenirs et de nouveauté. William travaillant à Météo France, nous appelions ça le suspense météorologique du film.
Contre toute attente, et malgré les prévisions concernant l'automne de leur vie, les personnages se retrouvent embarqués dans des courants instables, printaniers... Imprévisibles. L'adolescence retrouvée de William et Madeleine, c'est l'émoi partagé des premières fois. Un couple sans peur et sans reproche."


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