Le Facteur sonne toujours deux fois, film américain de Tay Garnett, sorti en 1946

Le Facteur sonne toujours deux fois (The Postman always rings twice) est un film américain de Tay Garnett sorti en 1946, d'après un roman éponyme de James M. Cain. Un remake de ce film a été réalisé en 1981 par Bob Rafelson

Le film se situe dans l'ouest américain, à la fin des années 1930. Le vagabond Frank Chambers se fait engager en tant que mécano-pompiste à une station essence le long de la côte en Californie, il vient d'y être déposé, après avoir fait du stop, par le voisin, qui est procureur.

Son nouveau patron, Nick, un homme affable dans la cinquantaine, y est également propriétaire d'un restaurant-bar qui accueille les voyageurs de passage. Il est marié à la très belle et très jeune Cora, qui semble ne pas travailler beaucoup et qui est cependant très ambitieuse.
Cora n'est tout d'abord pas enchantée que Frank reste travailler et vivre avec eux. Frank l'embrasse de force ce premier jour. Le temps passe et Cora et Frank deviennent amants.

En l’absence de Nick, il lui demande une fois de s'en aller avec lui, ce qu’ils entreprennent. Sur la route, à pied, les choses s'avèrent plus désagréables que prévues et Cora décide de rentrer chez elle ; Frank la suit. Un plan pour faire disparaître Nick est mis au point. Celui-ci sera assommé dans son bain, ce qui devra passer pour un accident.
Le soir prévu, un court-circuit empêche le plan de se dérouler comme prévu et Nick, seulement assommé et ne se doutant de rien, passe sa convalescence à l'hôpital. Frank quitte ensuite Cora et Nick, mais celui-ci, quelques semaines plus tard, tombe sur Frank par hasard et le ramène à la maison.

 

Nick annonce qu'il va vendre son commerce pour aller vivre, avec Cora, auprès de sa sœur malade. Cette décision n'enchante pas du tout Cora. Un nouveau plan pour se débarrasser de Nick est élaboré. Alors qu'ils se rendent les trois en voiture à une rencontre avec l'acheteur de la station, Nick, qui est saoul, est assommé. L’automobile est poussée dans un ravin mais Frank doit l'aider à dévaler la pente : il chute même avec celle-ci. Le procureur, qui avait des soupçons depuis l’affaire de la baignoire, les a suivis et arrive sur la scène de ce qu’il interprète comme un crime.

Nick est mort et Frank s'en sort avec des blessures. Lui et Cora sont jugés pour meurtre. Après que Frank, manipulé par le procureur, ait dénoncé Cora, l'avocat de celle-ci organise une machination subtile où Cora signe des aveux et un arrangement est obtenu avec les compagnies d’assurances, celle sur la vie que Nick avait signées mais que ni Cora ni Frank connaissaient, ce qui fournit un beau mobile pour le procureur et celle qui devrait indemniser Frank en raison du tort physique subi dans la chute de la voiture.

L’accusation du procureur est finalement modifiée et Cora et Frank sont libérés. Ils retournent au restaurant mais le cœur n'y est plus puisque Frank a trahi Cora. Les affaires du restaurant se développent grâce à la renommée de leur propriétaire, la sulfureuse Cora. Enfin, pour faire taire les rumeurs, Cora et Frank se marient. Cora part en déplacement car sa maman est très malade, et meurt. Pendant ce temps, Frank, incontournable, séduit une autre femme, ce qui sera découvert ensuite par Cora, qui s'en fâchera. Cora et Frank sont victimes d'un chantage sur la base des aveux de Cora mais le maître chanteur se fait vite déborder et Cora et Frank reprennent possession du dangereux document. Cora est enceinte. On fête cette bonne nouvelle avec force boissons alcoolisées et, dans ces circonstances, un véritable accident d’automobile survient, dans lequel meurt Cora. Frank, qui, en tant que mari, hériterait de tous les biens de Cora, est accusé et condamné pour le meurtre de sa femme. Celle-ci a aussi laissé une lettre d'adieu avant son suicide manqué qui les accuse les deux du meurtre de Nick.

Après celle de Chenal (Le dernier Tournant, 1939) et celle de Visconti (Ossessione, 1942), c'est la première adaptation américaine du roman de James Cain. Tay Garnett, qui habituellement ne se pique pas de psychologie, fouille ici la description de ses personnages et les motivations de ses deux assassins. Il montre en particulier chez la femme un désir de respectabilité qui paradoxalement la pousse au crime, car elle n'imagine pas le grand amour sans le confort et la prospérité dont elle a pris le goût à la suite de son premier mariage.

Cela n'empêche pas l'amour que se portent les deux amants criminels d'être réel et profond. D'où l'ambiguïté tragique d'un récit où les forces de vie et les forces de mort, le mensonge et la vérité s'entremêlent inextricablement comme le suggère le symbolisme inversé des vêtements blancs de l'héroïne.

Ce film de Garnett est un chef-d'œuvre de réalisme psychologique et social. La vérité des atmosphères débouchent sur un irréalisme poétique et lyrique. Ainsi la présence de l'océan dans plusieurs séquences introduit une dimension inconnue du roman de Cain. La disparition finale des amants appelés à se retrouver quelque part dans une union sublimée et éternelle vient tempérer l'aspect sanction de la justice immanente. Garnett agit ainsi en amoraliste poétique qui croit beaucoup plus à l'harmonie cosmique de l'univers qu'à la mesquine et trompeuse justice des hommes.

Sur l'aspect érotique du film, le code moral de l'époque n'empêche pas une intensité prenante. Ainsi la première rencontre, en caméra presque subjective, permet au spectateur de découvrir en premier les sublimes jambes de Lana Turner, accompagnant ainsi les émotions de Frank.


L'auteur

La carrière de Tay Garnett (1898-1977) est l'exemple type de la génération des tâcherons qui se hissèrent jusqu'à la réalisation à force de volonté et d'imagination. Il conquit la notoriété avec Voyage sans retour. Film exceptionnel dans une carrière surtout consacrée à l'aventure et qu'illustra La Malle de Singapour, qui, grâce au tandem Jean Harlow-Clark Gable, eut les honneurs d'un Festival de Venise.
On évoque Tay Garnett comme d'un petit-neveu de Hawks par la satyre douce-amère et la maîtrise technique. Plus sommaire, et plus léger certes. D'ascendance irlandaise comme John Ford, il partageait avec lui le goût des bagarres monumentales, fignolées au long de films de commande (La Taverne des 7 péchés, Les Corsaires de la terre).
Sérieux jusqu'à l'ennui dans quelques adaptations de best-sellers, il a apporté l'humour partout où il a pu. Quelque fois même la poésie : on n'oubliera ni le chandail blanc de Lana Turner dans ce film, ni le défilé des heaumes extravagants des paladins, et la perruque blonde que les druides imposent à la brune Patricia Medina, prête à être sacrifiée dans Le Serment du Chevalier Noir.
Le respect de l'atmosphère et l'amour du cinéma sauvent, ainsi, plus d'un de ses films des écueils de la pure parodie. Et, à défaut d'une œuvre achevée, Tay Garnett a prolongé jusque dans ses dernières œuvres une série de morceaux choisis dont le charme permet de le classer parmi les auteurs mineurs, mais authentiques.

Le roman Le Facteur sonne toujours deux fois de James M. Cain (1892-1977), célèbre auteur américain, reconnu comme un des maîtres du roman noir a inspiré de nombreuses adaptations au cinéma. En raison du Code Hays, de censure états-unienne, les deux premières adaptations ont été tournées en Europe:

  • Le Dernier tournant (1939), de Pierre Chenal, avec notamment Michel Simon (dans le rôle de Nick).
  • Ossessione (Les Amants diaboliques, 1943), de Luchino Visconti; le livre n’est pas mentionné au générique, car Visconti n'en possédait pas les droits
  • The Postman always rings twice, de Tay Garnett en 1946, le présent film
  • The Postman always rings twice ( 1981), de Bob Rafelson
  • Szenvedély (Passion, 1998), de György Fehér, film hongrois de 155 min en noir et blanc.

Distribution

  • Lana Turner : Cora Smith
  • John Garfield : Frank Chambers
  • Cecil Kellaway Turner : Nick Smith
  • Hume Cronyn : Arthur Keats, l'avocat
  • Leon Ames : Kyle Sackett, le procureur

Fiche technique

  • Titre original : The Postman always rings twice
  • Réalisation : Tay Garnett
  • Scénario : Harry Ruskin et Niven Busch, d’après un livre de James M. Cain
  • Images : Sidney Wagner
  • Musique originale : George Bassman
  • Son : Douglas Shearer
  • Montage : George White
  • Production : Carey Wilson, pour la Metro-Goldwyn-Mayer
  • Pays : États-Unis
  • Durée : 113 minutes
  • Format : Noir et blanc
  • Dates de sortie : 2 mai 1946 (USA) ; 12 novembre 1947 (France)



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