Sommaire

Yves Klein

Les Nouveaux Réalistes

Le groupe des Nouveaux réalistes est fondé en 1960 par le peintre Yves Klein et le critique d'art Pierre Restany à l'occasion de la première exposition collective à la galerie Apollinaire de Milan.

La Déclaration constitutive du Nouveau Réalisme, qui proclamera « Nouveau Réalisme nouvelles approches perceptives du réel », sera signée par Arman, François Dufrêne, Raymond Hains, Martial Raysse, Daniel Spoerri, Jean Tinguely, Jacques Villeglé dans l'atelier d'Yves Klein le 27 octobre 1960.

Ils prennent position pour un retour à la réalité, en opposition avec le lyrisme de la peinture abstraite de cette époque mais sans tomber dans le piège de la figuration connotée (au choix) petite-bourgeoise ou stalinienne, et préconisent l'utilisation d'objets existants pour rendre la réalité de leur temps, à l'image des ready-made de Marcel Duchamp. Ces conceptions s'incarnent notamment dans un art de l'assemblage et de l'accumulation, qui utilise telle quelle la réalité quotidienne : accumulations d'objets par Arman, affiches de cinéma lacérées par Villeglé...

Contemporain du Pop Art américain, dont il est souvent présenté comme la transposition en France, le Nouveau réalisme incarne, avec Fluxus, l'une des nombreuses tendances de l'avant-garde dans les années 1960. Il est dissous en 1970.

Le 16 octobre 1960, le critique d'art français Pierre Restany publie à Paris et Milan le premier « Manifeste du Nouveau Réalisme ».
Le 27 octobre 1960, au domicile d’Yves Klein, Arman, Dufrêne, Hains, Raysse, Restany, Spoerri, Tinguely et Villeglé signent en neuf exemplaires la déclaration constitutive du groupe des Nouveaux Réalistes, affirmant par là leur « singularité collective ». César et Rotella, conviés à la réunion, n’ont pu s’y rendre, tandis que Niki de Saint Phalle et Deschamps rejoindront le groupe en 1961.
Il sera suivi l'année suivante d'un second manifeste, rédigé entre le 17 mai et le 10 juin 1961, et intitulé « 40° au dessus de Dada ».

Les 9 signataires de la déclaration constitutive du groupe

Autres membres du groupe:

César, Mimmo Rotella, Niki de Saint Phalle et Gérard Deschamps rejoindront le mouvement en 1961, Christo en 1963

Leur travail collectif, des expositions élaborées ensemble, s’étend de 1960 à 1963, mais l’histoire du Nouveau Réalisme se poursuit au moins jusqu’en 1970, année du dixième anniversaire du groupe marquée par l’organisation de grandes manifestations.


La prise de conscience d’une « singularité collective » est déterminante, mais leur regroupement se voit motivé par l’intervention et l’apport théorique du critique d’art Pierre Restany, lequel, d’abord intéressé par l’art abstrait, se tourne vers l’élaboration d’une esthétique sociologique après sa rencontre avec Klein en 1958, et assume en grande partie la justification théorique du groupe.

Le terme de Nouveau Réalisme a été forgé par Pierre Restany à l’occasion d’une première exposition collective en mai 1960. En reprenant l’appellation de « réalisme », il se réfère au mouvement artistique et littéraire né au 19e siècle qui entendait décrire, sans la magnifier, une réalité banale et quotidienne.
Cependant, ce réalisme est « nouveau », de même qu’il y a un Nouveau Roman ou une Nouvelle Vague cinématographique : d’une part, il s’attache à une réalité nouvelle issue d’une société urbaine de consommation, d’autre part, son mode descriptif est lui aussi nouveau car il ne s’identifie plus à une représentation par la création d’une image adéquate, mais consiste en la présentation de l’objet que l’artiste a choisi.

C’est aussi à Pierre Restany que l’on doit d’avoir défendu le Nouveau Réalisme sur la scène internationale face à l’émergence d’un art américain, le Pop Art, soutenu économiquement par un réseau de galeristes et de collectionneurs.

Les artistes reprennent les objets de la société pour en faire des reliques, des symboles puissants de la consommation.
Exemple : Les compressions de César qui mettent en scène des automobiles, le but étant de transformer un objet culte de notre société et d’en faire quelque chose d'autre, à travers ses formes géométriques, l’œuvre sent la conception par l’intermédiaire d’une machine, c’est la disparition de l’habileté manuelle qui était à l’époque un facteur important dans la reconnaissance de la valeur d’un artiste.


Arman

Merci de cliquer sur le partenaire situé au dessus

 

Il faut noter également la disparition du matériau noble, les nouveaux réalistes n’utilisent plus de bronze, de pierre, mais de la tôle ou du ciment, des matériaux industriels.

Autre exemple, l’accumulation d’Arman, qui est un agglomérat de voitures de marque Renault, chez qui il est directement allé travailler pour trouver sa matière première. Son œuvre n’a pas d’utilité particulière mais il veut surtout le mouvement et la couleur, on ne retient plus que les effets plastiques.

Le matériel n’est pas détourné, il est utilisé pour travailler un mouvement et devient matériau.

Une autre manière de transformer un matériel en matériau selon César, c’est sa mousse de polyuréthane, c’est un matériau presque vivant qui échappe au control de l’artiste, la matière se fixe ses propres limites, et l’œuvre devient indépendante du projet plastique.

Quant à Gérard Deschamps, il assemble des chiffons, des sous-vêtements feminins (ce qui lui vaudra d'être censuré à de nombreuses reprises) ou expose des bâches de signalisation de l'armée américaine, des plaques de blindage, des tôles irisées par la chaleur, des patchworks, des ballons dans des boîtes en plexiglas ou dans des filets, des skateboards, des « pneumostructures » faites de bouées ou de matelas pneumatiques.

L’œuvre de Daniel Spoerri rend compte de la société de consommation qui mange, il se sert dans les poubelles de ses voisins, de ses congénères.
Il s’agit du détournement d’un moment important de la journée, qui est figé et réinvesti dans l’art. La résine est affichée contre le mur comme une toile. Il a la volonté de fixer le temps d’un moment sensé être agréable alors que la société veut de plus en plus nous le marchandiser, et nous presser.
Le repas n’est plus le moment convivial qu’il était avant, il devient la nouvelle cible des grosses sociétés de consommation, on se retrouve presque dans une succursale d’une enseigne de la restauration rapide alors que l’on est chez soi.
Faire vite, faire simple, peu importe que ce soit vraiment bon. Il faut faire vite, se nourrir, manger, boulimiquement, pour se remplir, Spoerri met ici l’accent sur la nécessité d’un retour aux sources, et d’une société de consommation qui influencerait moins de ses codes, et qui submergerait moins de ses produits, la société actuelle.

Renvoyant à l'univers de la publicité et de la société de consommation, les affiches, décollées, superposées, lacérées, inspirent Jacques Villeglé, Raymond Hains et François Dufrêne ainsi que Mimmo Rotella, qui suit un itinéraire parallèle mais distinct.

Les nouveaux réalistes ont également été proches des membres du groupe Zéro, et la démarche d'artistes comme Jean-Pierre Raynaud ou Erik Dietman s'apparente aussi à la leur.


Déclarations:

  • «Les nouveaux réalistes considèrent le Monde comme un Tableau, le Grand Œuvre fondamental dont ils s’approprient des fragments dotés d’universelle signifiance. Ils nous donnent à voir le réel dans des aspects de sa totalité expressive. Et par le truchement de ces images spécifiques, c’est la réalité sociologique toute entière, le bien commun de l’activité des hommes, la grande république de nos échanges sociaux, de notre commerce en société qui est assigné à comparaître. Dans le contexte actuel, les ready-made de Marcel Duchamp (et aussi les objets à fonctionnement de Camille Bryen) prennent un sens nouveau.
    Ils traduisent le droit à l’expression directe de tout un secteur organique de l’activité moderne, celui de la ville, de la rue, de l’usine, de la production en série. Ce baptême artistique de l’objet usuel constitue désormais le "fait dada" par excellence. Après le NON et le ZERO, voici une troisième position du mythe : le geste anti-art de Marcel Duchamp se charge de positivité. L’esprit dada s’identifie à un mode d’appropriation de la réalité extérieure du monde moderne. Le ready-made n’est plus le comble de la négativité ou de la polémique, mais l’élément de base d’un nouveau répertoire expressif.
    Tel est le nouveau réalisme : une façon plutôt directe de remettre les pieds sur terre, mais à 40° au-dessus du zéro de dada, et à ce niveau précis où l’homme, s’il parvient à se réintégrer au réel, l’identifie à sa propre transcendance, qui est émotion, sentiment et finalement poésie, encore. »
    Pierre Restany, À 40° au-dessus de DADA, préface au catalogue de l’exposition, Galerie J, 1961
  • « L’école niçoise veut nous apprendre la beauté du quotidien. Faire du consommateur un producteur d’art. Une fois qu'un être s'est intégré dans cette vision, il est très riche, pour toujours. Ces artistes veulent s'approprier le monde pour vous le donner. A vous de les accueillir ou de les rejeter. »
    Pierre Restany, Avec le nouveau réalisme, sur l’autre face de l’art, Nîmes, Éditions Jacqueline Chambrons, 2000

Expositions principales:

  • La première exposition du groupe des Nouveaux réalistes a lieu en novembre 1960 au Festival d'avant-garde de Paris.
  • mai 1961 à la Galerie J, 8 rue Montfaucon, Paris 6e
  • octobre 1962 : la galerie Sidney Janis de New York organise l’exposition The New Realists,
  • 1963 : À Munich, a lieu le 2e Festival du Nouveau Réalisme, au cours duquel Christo se joint au groupe.
    La 4e Biennale de San Marino marque la dernière exposition collective formelle du groupe.
  • 1970 : À Milan, les Nouveaux Réalistes organisent une série de manifestations pour fêter leur dixième anniversaire, avec une exposition Les Nouveaux Réalistes 1960/1970
  • 1986 : au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, rétrospective 1960, les Nouveaux Réalistes
  • 1997 : Musée d’art contemporain de Nice : De Klein à Warhol. Face à face France/Etats-Unis